À Istanbul, l'ONU appelle à combler le fossé entre islam et Occident
L'Alliance des civilisations, un groupe de travail des Nations unies, préconise une reprise du processus de paix au Proche-Orient.
LES VINGT sages de l'Alliance des civilisations, le groupe de travail de l'ONU constitué pour lutter contre le choc entre l'Occident et l'Orient, ont rendu leur rapport hier à Istanbul. Dans les recommandations adressées aux trois parrains de cette initiative, les chefs de gouvernement espagnol et turc ainsi que Kofi Annan, le secrétaire général de l'ONU, ils ont fait de la résolution du conflit israélo-palestinien une condition sine qua non pour éviter un affrontement des civilisations, entre pays occidentaux et monde islamique.
Tirant la sonnette d'alarme sur l'urgence à désamorcer de tels risques, l'Alliance des civilisations s'est prononcée pour « la reprise du processus politique, incluant la tenue d'une conférence internationale sur le processus de paix au Proche-Orient aussi vite que possible ». Si le groupe onusien a placé ce sujet au coeur de sa réflexion, c'est parce que, selon lui, « le problème israélo-palestinien est devenu un symbole clé du fossé entre les sociétés occidentale et musulmane et constitue une des plus graves menaces à la stabilité internationale ».
Mission
Pour expliquer la brèche ouverte entre l'Ouest et l'Orient, la « perception du double standard dans l'application des droits de l'homme (née des politiques occidentales, NDLR), qui augmente le sentiment de vulnérabilité de nombreux musulmans dans le monde » a été renvoyée dos à dos avec « les leaders religieux autoproclamés » qui professent « un enseignement de l'islam aux interprétations étroites et déformées ». L'Alliance des civilisations, qui se compose de personnalités internationales, a été créée en novembre 2005 à l'ONU mais imaginée par José Luis Rodriguez Zapatero après les attentats de Madrid en 2004.
La crise qui a enflammé le monde musulman après la publication des caricatures de Mahomet a conforté le groupe dans le bien-fondé de sa mission. « Nous ne pouvons pas rester inactifs face aux affirmations qui prétendent que le clash des cultures et des civilisations est inéluctable », a enjoint le chef du gouvernement espagnol. « Un luxe » d'autant plus impossible, lui a répondu le premier ministre turc, que « la tolérance des différentes cultures s'affaiblit ». Avant d'ajouter que l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne constitue selon lui « la réponse la plus efficace » aux tenants d'un choc des civilisations.
« Si on veut lutter contre ce risque d'affrontement, il faut désamorcer les problèmes politiques, met en garde Hubert Védrine, membre de l'Alliance. Sinon, il y a peu de chances que les recommandations, si inspirées soient-elles, produisent le moindre effet. » Un diagnostic partagé par Kofi Annan, pour qui « toutes ces leçons auront peu d'impact si le climat actuel de peur et de suspicion continue à être alimenté par les événements politiques, spécialement ceux dans lesquels les peuples musulmans [...] sont perçus comme étant les victimes d'intervention militaire de puissances non musulmanes. »
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