Ils Etaient une centaine de milliers à s'être déplacés d'un peu partout pour la 22e rencontre des musulmans de France. Les organisateurs parlent de quelque 200 000 personnes réunies au Bourget (région parisienne), depuis vendredi, pour une manifestation qui prend fin aujourd'hui. Débats, conférences, expositions et soirées… Un programme riche pour un thème d'actualité. Un an après la loi du 15 mars 2004 (sur le port des signes religieux à l'école), les musulmans de France sont venus au Bourget faire le point sur l'Islam de France. Définition et défis. L'ouverture de la plus grande manifestation des musulmans de France a eu lieu vendredi 25 mars. Le rideau s'est levé sur la lecture d'un mot de Abdenaceur Zerrouky, directeur de la rencontre.
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Les musulmans de France sont venus faire le point sur la relation entre l'Islam et les valeurs républicaines
Celui-ci, en souhaitant la bienvenue aux milliers de participants présents ce premier jour, avait aussi tenu à louer le travail de toute l'équipe d'organisation qui compte plus de 600 bénévoles.
Latifa Ait Taleb, l'adjointe du directeur, a souligné, quant à elle, que parmi les nouveautés de cette année, plus d'espace a été donné aux ateliers de discussions, logés dans la salle d'exposition et animés par des savants et théologiens de France et d'ailleurs.
Les organisateurs ont aussi rappelé que faute de répondre aux demandes de participation de tous les musulmans européens qui en ont fait la demande, une retransmission de l'événement aura lieu via le site Internet de la rencontre.
Islam de France
" Islam de France, quel contenu ? ". Un thème qui suscite bien des questions, mais avec auquel l'Union des organisations islamiques de France, organisatrice de cette rencontre, veut surtout tenter d'apporter des réponses. Ceci, aussi bien aux membres de la communauté musulmane qui semble subir des pressions de tous genres, qu'au reste de la nation française, qui ne sait pas toujours de quel œil regarder cette importante tranche de sa société.
" Le corpus musulman ne change certes pas, mais il faut contextualiser la pratique ", la déclaration de Adel Abul Ola, professeur de Civilisation musulmane et imam de la Mosquée de Jeddah, résume tout ce qui va suivre dans les interventions au programme de cette rencontre. " La jurisprudence musulmane contient des possibilités pour sortir du dilemme qui oppose, par moment, la pratique cultuelle aux lois du pays d'accueil ", ajoute pour sa part Larbi Bechri, professeur à l'Institut des sciences humaines, Château-Chinon.
Les pressions subies par la communauté musulmane en France et ailleurs en Europe proviennent aussi bien de l'intérieur même de la communauté que de l'extérieur.
D'où le vif intérêt porté par les premiers intervenants sur les conseils à donner aux membres de cette communauté. L'Islam n'a jamais été synonyme d'ignorance ni d'intolérance. L'Ijtihad a toujours permis à cette religion qui se veut dynamique à la base, d'être toujours en phase avec les sociétés où elle se pratique.
" Les pressions internes à la communauté viennent de tous ceux qui font une lecture littéraliste des textes et leur refusent cette flexibilité qui existe pourtant dans l'Islam ", explique le professeur Bechri. L'Islam des réformistes semble, en effet, avoir du mal à trouver autant d'échos que les discours obscurantistes qui renvoient aujourd'hui de l'Islam l'image d'une religion austère et fermée.
Dans l'enfermement identitaire et religieux plus particulièrement, il y a ce que François Burgat, directeur de recherche au CNRS appelle, " le piège du repli défensif et réactif, qui finit par nier à l'autre ses spécificités et surtout sa capacité à être des nôtres ". L'analyse est alors valable dans les deux sens. " La question qui se pose aujourd'hui est double : qu'est-ce que la République demande aux musulmans, et qu'est-ce que les musulmans sont en droit de demander à la République ? ", ajoute M. Burgat.
La France et l'Islam
Un an après la loi sur le voile, la communauté musulmane en France se sent encore visée par plusieurs démarches politico-idéologiques. " Pour une grande majorité des Français, un musulman ne peu réellement être des nôtres que s'il boit son verre comme les autres, et qu'il ne s'aventure surtout pas à s'absenter pour prier à l'heure de l'apéritif ", souligne François Burgat. Les valeurs humanistes qui doivent être " le socle de la nation " française n'ont pas encore pris la place des différents repères identitaires qui peuvent partager au lieu de pacifier un peuple.
Le Professeur d'Aix en Provence propose alors des solutions afin que la République puisse dépasser ces disfonctionnements qui l'empêchent d'intégrer pleinement sa communauté musulmane. " On doit tout d'abord refuser de céder à l'atmosphère internationale qui criminalise toute expression politique de la culture musulmane. Ensuite, il faut que l'espace public soit ouvert à tout le monde. Il faut qu'on arrive à entendre, aux heures de grande écoute, les représentants de l'Islam de France, s'exprimer sur toutes les questions qui les concernent et qui touchent le monde aujourd'hui. On ne doit pas céder à la facilité de créer des interlocuteurs sympathiques qui nous conviennent plus ".
Les musulmans de France doivent renoncer à nier à l'autre la capacité d'exister, tout comme la République ne doit être basée que sur "la matrice humaniste qui transcende l'appartenance religieuse ".
Sans cela, le piège dangereux de l'exclusion, dans les deux sens, risque de former des victimes dans les deux bords.
L'UOIF semble avoir choisi de jouer la carte de l'ouverture pour cette 22e rencontre du Bourget, en invitant d'éminents orateurs, musulmans ou non, pour mieux communiquer sur le thème de la tolérance comme étant la clé d'une coexistence pacifique au sein de la nation française.
http://www.lematin.ma/journal/article.asp?id=inter&ida=45838
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