Thalassa
29 avril 2005 20h45 sur France 3
» Un cri de joie lancé devant la mer, à Trébizonde, en Turquie, par les guerriers grecs, après une épouvantable retraite relatée par Xénophon. En l’an 401 avant Jésus- Christ, cette mer, Thalassa, c’est la mer Noire. Noire car chaque point cardinal des marins ottomans portait un nom de couleur : le rouge, c’était le Sud, et le noir, le Nord. Une mer quasiment fermée, mais un territoire maritime gigantesque qui, du détroit du Bosphore jusqu’aux monts du Caucase, parcourt plus de 1200 km, bordant la Turquie, la Bulgarie, la Roumanie, l’Ukraine, la Russie, la Géorgie. Cette mer fut l’objet des convoitises des plus grands empires qui ont régné sur le monde méditerranéen.
Les Soviétiques, qui se partageaient les rivages de la mer Noire avec les Turcs, en avaient fait leur débouché sur la Méditerranée, ils y bâtirent de grands ports, des usines ; des chantiers navals, y établirent une flotte surpuissante, y firent passer leur pétrole. Côté turc, devant l’écrasante présence de leur voisin, et leur façade en Méditerranée, les ports de la mer Noire sont restés principalement dédiés au commerce et à la pêche ou à la petite construction en bois. Aujourd’hui, la mer Noire est au centre d’un monde instable, qui a éclaté ou qui va éclater. L’effondrement de l’Empire Soviétique, l’embrasement des Balkans, et les batailles pétrolières de la Caspienne, dont elle représente le débouché maritime, ont projeté cette mer au cœur de bien des enjeux, politiques, économiques, stratégiques. Les Russes, autrefois « propriétaires » avec leurs pays frères de la moitié des lieux, n’en ont plus qu’une portion congrue, à leur grand désespoir. C’est l’Ukraine qui a hérité des deux ports mythiques de l’ex-Empire, Odessa et Sébastopol. Odessa, où les jeunes filles sont maintenant admises dans la prestigieuse Académie navale. Les ex-pays de la République Soviétique tentent de leur côté de survivre, entre indépendance et crise économique. Plus que jamais, la mer Noire représente pour eux l’espoir de jours meilleurs. A Poti, en Géorgie, c’est l’arrivée du pétrole de la Caspienne par oléoduc qui a tout changé, en créant dans ce pays pauvre une manne pour l’emploi. En Roumanie, c’est l’esturgeon et son précieux caviar qui redonne l’espoir aux pêcheurs du delta du Danube. En Bulgarie, ce sont les kilomètres de plages et les grands hôtels soviétiques du front de mer qui font rentrer les devises, toute l’Europe du Nord déferle ici pour les vacances les moins chères du monde.
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