La planète respire déjà un peu mieux
Dans un geste sans précédent, la communauté internationale s'est engagée à réduire ses émissions de plus de la moitié pour éviter tout «changement climatique dangereux».
La position prise hier soir à la conférence de Nairobi a réjoui les écologistes. S'ils trouvent timide le calendrier des futures négociations, ils reconnaissent le courage de cette déclaration, adoptée par une centaine de pays. Un bémol toutefois: les délégués n'ont pas fixé de date pour l'atteinte d'un tel objectif.
Pas plus, d'ailleurs, qu'ils n'ont adopté d'échéancier pour les négociations qui doivent mener à la période de l'après-2012.
Certes, les pays ont convenu de faire en 2008 la révision scientifique du traité, cette étape qui doit précéder les «vraies» négociations. Mais il s'agit là d'une année repère plutôt que d'une date limite, ce qui permettra aux pays de décider alors s'ils souhaitent poursuivre la révision ou non.
Les pressions de certains pays comme la Chine et l'Arabie Saoudite auront donc eu raison de la volonté européenne de fixer un calendrier serré pour les négociations. «Le fait que l'on n'ait pas réussi à s'entendre sur un échéancier est un problème, a commenté Steven Guilbeault, de Greenpeace. Il faudra s'assurer l'an prochain que les pays adoptent un mandat pour que les négociations se terminent en 2008.»
Les écologistes souhaitent en effet que les négociations se terminent dans deux ans, de façon à s'assurer qu'il n'y ait pas de «vide» entre la première période (2008-2012) et celle qui suivra. La crainte est que le marché du carbone et les entreprises réagissent très mal à une telle incertitude.
Malgré ces réserves, les organismes canadiens de défense de l'environnement se réjouissent qu'un pas, aussi petit soit-il, ait été fait lors de cette conférence de deux semaines. Il faut dire que leurs attentes n'étaient pas très élevées: la conférence de Nairobi n'était qu'une «conférence de transition» après celle, plus importante, de Montréal.
Proposition russe
Par ailleurs, les pays ont accepté que de nouveaux membres intègrent le protocole. Cette décision, jugée «historique» par les délégués mais décriée par les écologistes, permet maintenant à la Biélorussie et au Kazakhstan de se joindre aux pays qui ont ratifié l'entente mais qui n'ont pas de cibles de réduction.
Des avancées ont aussi été accomplies pour l'Afrique et l'ensemble des pays en développement. D'abord, les pays se sont engagés à rendre «plus accessibles pour tous» les projets verts des pays riches.
Cela répond aux doléances de l'Afrique, qui se sent injustement traitée par le mécanisme du développement propre (MDP). Celui-ci permet à des pays industrialisés d'investir dans des pays en développement en échange de droits de polluer. Le problème, c'est que les projets se concentrent en Chine (36%), en Inde (20%) et au Brésil (12%). L'Afrique est loin derrière (2%).
À ce sujet, d'ailleurs, le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a annoncé mercredi l'engagement de six agences des Nations unies pour aider les pays en développement à se prévaloir de ce mécanisme.
Les pays africains et l'ensemble des pays en développement se sont aussi réjouis de l'entente intervenue sur le Fonds pour l'adaptation du protocole. Les pays les moins riches étant souvent les principales victimes des changements climatiques, la communauté internationale s'est entendue sur une façon de les aider financièrement.
Un bémol, toutefois: la question de la gouvernance reste en suspens. Les pays ne se sont pas mis d'accord sur le choix de l'organisme qui devra gérer le fonds.
Enfin, dernier point important, les signataires de Kyoto ont poursuivi leur «dialogue» avec les États-Unis et l'Australie, les deux pays riches qui refusent toujours de se joindre à l'effort commun.
À Montréal l'an dernier, une entente in extremis avec les Américains avait permis d'entreprendre un «dialogue ouvert et non contraignant» qui s'est poursuivi à Nairobi. Il s'agit en fait d'un simple échange d'information et d'idées, car l'administration Bush s'était assurée de signer une entente qui «ne marquera pas l'ouverture de négociations débouchant sur de nouveaux engagements».
Notons que l'Indonésie accueillera la prochaine conférence, qui se tiendra du 3 au 14 décembre 2007.