THÉ Et FEU
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

THÉ Et FEU

Bienvenue sur TFE. Buvons du THÉ et discutons autour du FEU. Hoşgeldiniz, sefalar getirdiniz.
 
AccueilAccueil  PortailPortail  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  Connexion  
Le Deal du moment :
Carte Fnac+ Jackpot avec 30€ offerts sur le ...
Voir le deal
19.99 €

 

 Divorce durable entre l'Europe et le monde musulman

Aller en bas 
AuteurMessage
Faj
Âme Sentimentale qui se lie à l'Anatolie
Âme Sentimentale qui se lie à l'Anatolie
Faj


Masculin Nombre de messages : 5412
Age : 50
Localisation : Brüksel, Canterville
Date d'inscription : 27/04/2005

Divorce durable entre l'Europe et le monde musulman Empty
MessageSujet: Divorce durable entre l'Europe et le monde musulman   Divorce durable entre l'Europe et le monde musulman EmptyJeu 23 Fév - 17:42

Divorce durable entre l'Europe et le monde musulman


L'affaire des caricatures de Mahomet relève du paradoxe : les pays de l'Union européenne se trouvent en première ligne face à la colère des manifestants dans le monde musulman alors que les Etats-Unis ont été relativement épargnés. Pourtant, l'Europe, la France en particulier, n'a cessé de plaider pour un dialogue des cultures et des civilisations alors que les Etats-Unis sont depuis 2003 les boucs émissaires favoris, notamment au Moyen-Orient.


Certes, ce sont des journaux européens - danois tout d'abord, puis norvégiens, français et autres - qui ont publié ces dessins. Certes, la tradition laïque est plus ancrée en Europe qu'aux Etats-Unis qui, en dépit de la séparation de l'église et de l'Etat, demeurent le pays le plus religieux du monde occidental. Plus des deux tiers de la population américaine sont membres d'un lieu de culte. Washington a d'ailleurs marqué immédiatement sa réprobation à la publication de ces caricatures considérant qu'il était « inacceptable » d'inciter à la haine religieuse.


A l'inverse, la plupart des capitales européennes, à l'exception notable de Londres, ont avant tout laissé transparaître leur profonde gêne, prises entre la défense de la liberté de la presse, de la laïcité et les menaces contre leurs ambassades et leurs propres intérêts dans le monde musulman.


Tout cela fait évidemment de la vieille Europe une cible plus facile pour le fondamentalisme religieux. La France, après l'adoption de la loi sur le foulard islamique dans les écoles publiques françaises, s'était déjà trouvée sous la vindicte du monde musulman il y a deux ans. L'assassinat en novembre 2004 par un islamiste à Amsterdam du cinéaste et écrivain Theo Van Gogh est un autre signe de cette rupture.


Reste à comprendre les raisons profondes de ce malaise. Certains analystes ont avancé comme explication à cette colère anti-européenne les grands mouvements migratoires. L'Europe compte quelque 15 millions de musulmans alors qu'aux Etats-Unis, selon les estimations du département d'Etat, ils seraient environ 7 millions dont une partie sont des Noirs américains convertis à l'islam. Et l'on pourrait facilement croire que, derrière l'utilisation politique des violentes réactions anti-européennes, il y ait un appel au djihad (guerre sainte) auprès de certaines populations européennes. Mais toutes ces explications semblent insuffisantes. Quelques mois après les émeutes dans les banlieues françaises, l'islam en France - du moins officiellement - a montré une relative modération dans l'affaire des caricatures. Le Conseil français du culte musulman (CFCM) a ainsi préféré porter l'affaire en justice contre les journaux qui ont publié en France les caricatures.


De même, la liberté de la presse, notamment en matière de diffamation, est limitée en Europe, peut-être plus qu'aux Etats-Unis. L'utilisation de parodies religieuses n'y est en tout cas pas plus libre. La justice française a ainsi interdit l'affichage d'une publicité pour Benetton qui faisait référence à « La Cène » de Léonard de Vinci, estimant qu'il s'agissait d'une « composition parodique injurieuse pour les catholiques ». Quant aux tensions entre communautés, elles ne sont pas moins vives aux Etats-Unis qu'en Europe, même si souvent elles ne recouvrent pas des contours identiques religieux ou ethniques.


Face à cela, l'image américaine reste évidemment très dégradée. La guerre d'Irak y a été souvent perçue comme une croisade contre l'islam. Seule une légère amélioration a été enregistrée dans certains pays comme le Maroc au cours des derniers mois, selon une enquête publiée l'été dernier par l'institut américain de sondages d'opinion de Washington, Pew. Olivier Roy, directeur de recherche au CNRS, affirmait récemment que « l'anti-américanisme est aujourd'hui au Moyen-Orient la chose la mieux partagée ».


On aurait donc pu s'attendre logiquement à une réaction au moins aussi violente qu'aujourd'hui après la publication des photos de détenus irakiens de l'armée américaine dans la prison d'Abou Ghraib ou encore du traitement des prisonniers sur la base de Guantanamo. Au lieu de cela, de l'Indonésie au Nigeria, en passant par le Pakistan, l'Afghanistan, l'Iran, les Territoires palestiniens, le Liban, la Libye, la Syrie... la colère s'est focalisée beaucoup plus durement sur l'Europe. Le Premier ministre danois, Anders Fogh Rasmussen, ne se trompe pas en notant qu'« à un degré élevé », il s'agit d'une affaire entre l'Union européenne et le monde musulman. Selon lui, il n'y aura pas d'ailleurs de « solution rapide et facile à ce problème. Bien au contraire ! ».


Cette crise est en effet profonde. Nombre de dirigeants européens ont dénoncé l'exploitation politique faite par des extrémistes pour exploiter l'émoi d'une partie du monde musulman. Mais là encore, est-ce une explication suffisante ? Dans son livre « Fitna, guerre au coeur de l'islam », Gilles Kepel notait que « l'Europe est devenue un champ de bataille où se joue une grande part de l'avenir, par-delà le destin des musulmans européens en particulier, de l'islam du nouveau siècle dans sa globalité ».

Le risque aujourd'hui est que ce combat contre l'Occident, matérialisé par les attentats de 2001 aux Etats-Unis, ou encore ceux de Madrid, Londres, Djerba ou Charm el-Cheikh, et conduit par des cellules extrêmement minoritaires de militants plus ou moins reliées au réseau Al-Qaida, ne change de nature et trouve un plus large écho dans une fraction radicale du monde musulman. Et que l'Europe, faute d'une dimension politique, soit bien le maillon faible. Cela au moment même où la fracture au sein de l'islam, entre modérés et radicaux, se fait plus profonde. D'après une autre enquête de l'institut Pew, le rejet de l'extrémisme islamique se renforce dans nombre de pays musulmans. Près des trois quarts des Marocains, environ la moitié des Pakistanais, des Turcs et des Indonésiens, voient en effet dans le fondamentalisme islamique une menace pour leur propre pays.


Le risque pour l'Europe est de ne pas avoir les moyens de rétablir sa propre image dans les pays musulmans à la différence des Etats-Unis qui lors de cette crise n'ont pas épargné leurs efforts pour se tenir en dehors. Le haut représentant pour la politique étrangère européenne, Javier Solana, avait exprimé lors d'une visite au Caire son profond désir de rétablir de bonnes relations entre l'Union et le monde musulman. Cela risque en tout cas de rester un voeux pieux pendant longtemps.


JACQUES HUBERT-RODIER est éditorialiste de politique internationale aux « Echos »
Revenir en haut Aller en bas
http://forum.parsix.ift.fr/
 
Divorce durable entre l'Europe et le monde musulman
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Le féminisme musulman mettra les terroristes en échec
» A.M. : Fossé entre populations : qu'est-ce qui a changé ?
» Union entre confessions différentes
» Fossé entre Islâm et Occident
» Collaboration sur la R&D entre Turquie et Royaume-Uni

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
THÉ Et FEU :: ECHANGES DE POINTS DE VUE :: Actualité, Politique-
Sauter vers: