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 Nouvelle guerre froide dans le Caucase

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Faj
Âme Sentimentale qui se lie à l'Anatolie
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MessageSujet: Nouvelle guerre froide dans le Caucase   Nouvelle guerre froide dans le Caucase EmptyLun 27 Nov - 19:48

Nouvelle guerre froide dans le Caucase

Vladimir Poutine entend faire de la soumission de la Géorgie le symbole de la puissance russe retrouvée. Et le jeune président géorgien, qui comptait sur le soutien de Washington pour résister à son puissant voisin, s'interroge maintenant sur les véritables intentions de George Bush...

Khatouna a été raflée à Moscou, il y a un mois. Elle raconte, les yeux baissés : « Les policiers m'ont enfermée dans une cellule pendant trois semaines sans me dire pourquoi. Je n'avais aucun vêtement de rechange. J'étais menottée, et je n'avais le droit d'aller aux toilettes que deux fois par jour. Avec moi, il y avait une mère de famille, elle aussi géorgienne. Ils l'avaient séparée de ses deux enfants, qui hurlaient à l'autre bout de la prison. C'était horrible. » « Un jour, poursuit cette jeune femme frêle de 25 ans, les gardiens nous ont dit qu'ils allaient nous expulser vers la Géorgie. Pour être les premiers sur la liste, il fallait glisser 200 dollars à un milicien. Je ne les avais pas. J'étais une simple serveuse. Alors ils m'ont gardée plus longtemps. Finalement, ils m'ont mise dans un avion et je suis arrivée ici, à Tbilissi, où je ne connais personne. » Et Khatouna ajoute, en tremblant : « Jamais je ne retournerai en Russie. Jamais. »
Le ciel est tombé sur la Géorgie. En octobre, après l'arrestation spectaculaire de six espions russes à Tbilissi, le Kremlin a pris des mesures sans précédent contre la petite République du Caucase : expulsions (2 000 à ce jour), blocus naval, aérien et terrestre, embargo total, et enfin doublement du prix du gaz. Que mijote-t-on à Moscou maintenant ? Car Poutine n'en démord pas : le jeune président géorgien, le très proaméricain Mikhaïl Saakachvili, doit se repentir et faire allégeance au Kremlin. Mais rien n'y fait. Pour l'instant, « Micha », comme on l'appelle à Tbilissi, tient bon. Il a seulement fait un geste : il a renvoyé un ministre particulièrement antirusse. C'est tout. Or chacun le sait à Tbilissi : désormais sûre d'elle-même, la Russie de Poutine entend faire de la soumission de la Géorgie le symbole de sa puissance retrouvée. Et, pour parvenir à ses fins, le Kremlin ne reculera devant aucun coup tordu.
Qui l'en empêchera ? Face à leur immense voisin, les Géorgiens sont bien seuls. Ils doutent désormais du grand frère américain, sur lequel ils ont pourtant tout misé. Car la Maison-Blanche modère aujourd'hui son soutien au pays que George Bush, il y a encore un an, avait qualifié de « poste avancé de la démocratie ». C'est que, dans la partie d'échecs planétaire qui l'oppose de nouveau à la Russie - une sorte de guerre froide new look -, les Etats-Unis sont en train perdre la main. Ils doivent faire des concessions au Kremlin. Jusqu'où ? Si demain ils doivent sacrifier un pion, ce pourrait être le pays de la révolution des roses - en tout cas son président. Cela ferait tellement plaisir à Poutine !
Pourquoi, dans leur implacable grand jeu, les tout-puissants s'intéressent-ils donc tant à ce petit pays enclavé, misérable et dépourvu de richesses naturelles ? « Pour nous, répond un officiel américain, ce qui compte avant tout, c'est l'emplacement stratégique de la Géorgie. Le Caucase est le corridor par lequel les Occidentaux peuvent faire sortir les hydrocarbures de la mer Caspienne, et cela sans passer par la Russie. Or qui tient la Géorgie contrôle le Caucase, donc l'accès direct aux immenses réserves de la Caspienne. »
Cette voie de contournement de la Russie via la Géorgie est ouverte depuis l'été dernier. Un gigantesque oléoduc, le deuxième plus long du monde (1 760 kilomètres), relie désormais Bakou, en Azerbaïdjan, au port de Ceyhan, en Turquie, en passant par Tbilissi. Bientôt doublé par un gazoduc, ce pipeline, surnommé « BTC », a été mis en service le 13 juillet dernier. Et c'est justement depuis cette date que Moscou a accru sa pression contre la République du Caucase.
Le BTC obsède le Kremlin. Poutine a d'abord essayé de le torpiller. Aujourd'hui, il veut prendre le contrôle de ce pipeline très politique, construit par Shell, Chevron et Unocal. Des dizaines de milliards de dollars et le prestige international de Moscou sont en jeu. Car l'objectif des promoteurs du BTC est d'utiliser ce formidable tuyau pour pomper les réserves d'hydrocarbures non seulement d'Azerbaïdjan mais aussi de toute la Caspienne, jusqu'au Turkménistan - et cela toujours en contournant la Russie. « Ce qui représenterait pour Moscou une perte considérable en droits de passage et en influence en Asie centrale », dit un diplomate occidental en poste à Tbilissi.
Poutine a une autre raison de vouloir soumettre la Géorgie : les Etats-Unis répètent haut et fort qu'ils veulent faire de Tbilissi une tête de pont politicomilitaire de l'Occident dans l'ex-empire soviétique. Mieux : un modèle « démocratique » à exporter dans toutes les anciennes Républiques de l'URSS. En somme, une machine à rogner l'influence de l'autoritaire Russie dans larégion.
Pour le Kremlin, le cauchemar géorgien commence en décembre 2003, quand la révolution des roses porte au pouvoir de très jeunes leaders formés aux Etats-Unis. La Maison-Blanche mise sur eux. Elle les entoure de conseillers. L'Amérique s'occupe de tout. Elle boucle les fins de mois de l'Etat géorgien, forme ses militaires et investit massivement dans la reconstruction d'une armée en ruine. Washington fait aussi campagne pour l'entrée de la Géorgie dans l'Alliance atlantique. En échange, les jeunes révolutionnaires soutiennent à fond la guerre en Irak. Ils envoient 900 soldats à Bagdad, soit le deuxième contingent, par habitant, des pays de la coalition.
Tout, ou presque, marche selon les plans : en mai dernier, les Géorgiens ont inauguré leur première base militaire aux normes de l'Otan. Une seconde, elle aussi largement financée par les Etats-Unis, vient d'être mise en chantier. Du coup, malgré les réticences de Jacques Chirac, la Géorgie a, en octobre, amorcé un « dialogue intensif » avec l'Otan - un pas de plus vers l'adhésion, qui sera entérinée la semaine prochaine à Riga, lors du sommet annuel des chefs d'Etat de l'organisation.
Poutine enrage. Il redoute un effet domino. « Si la Géorgie entre dans l'Otan, l'Arménie voisine voudra faire de même. L'Azerbaïdjan suivra, et tout le Caucase non russe sera définitivement contrôlé par les Occidentaux. Puis, de proche en proche, c'est l'Asie centrale qui risquera de basculer », explique le géostratège Alexandre Rondali, dans son bureau flambant neuf à Tbilissi.
« Poutine est d'autant plus fou de rage qu'il croyait avoir passé un deal avec George Bush, assure à Moscou la politologue Lilia Shevtsova, de la fondation Carnegie. Au début des années 2000, il s'était montré très conciliant avec Washington : il avait accepté de retirer une base d'écoutes à Cuba, une autre au Vietnam, il avait donné son feu vert à l'implantation de troupes américaines en Ouzbékistan et au Kazakhstan afin que le Pentagone puisse mener son offensive en Afghanistan. Bref, il avait fait beaucoup de cadeaux à l'Amérique. En échange, Poutine pensait ou feignait de croire que la Maison-Blanche ne se mêlerait pas de ses affaires dans l'ex-URSS. » Or il s'est passé tout le contraire.
Début 2005, George Bush a fait de la conquête - pacifique - des anciennes Républiques soviétiques l'un des axes majeurs de sa politique étrangère, avec, on l'a vu, la Géorgie comme vaisseau amiral. Une gifle pour Poutine. Dans un rapport secret du Kremlin, « fuité » dans la presse russe en septembre, il est écrit : « Les Américains ont refusé de respecter l'accord tacite entre le Kremlin et la Maison-Blanche : un partenariat amical en échange du maintien de la CEI [l'ex-URSS] dans la sphère d'influence de Moscou. » Autrement dit, l'heure n'est plus aux embrassades avec les Etats-Unis, mais bien à la reconquête de l'empire - et en particulier de Tbilissi.
La contre-croisade a déjà commencé. Elle est menée au pas de charge. Avec des moyens détestables, mais diablement efficaces. En Asie centrale d'abord. En mai 2005, l'Ouzbékistan écrase dans le sang une révolte à Andijan. La communauté internationale condamne le massacre et prend des sanctions. Pas Moscou, qui félicite le dictateur ouzbek, Islam Karimov. Ce soutien a un prix : Poutine exige la fermeture des bases américaines en Ouzbékistan. Le sinistre Karimov s'exécute.
Puis c'est le tour de l'Ukraine. Poutine n'a pas digéré la révolution orange. Il attend lemoment propice pour remettre Kiev au pas. Début 2006, l'hiver est glacial, et la société ukrainienne, très divisée. La Russie saisit l'occasion. Le géant russe Gazprom, bras armé du Kremlin, coupe le gaz en direction de l'Ukraine, sans prévenir. L'effet est immédiat. A Kiev, un nouveau Premier ministre arrive, ouvertement prorusse, et le gaz est rétabli. Exit la révolution orange. Bien joué.
Reste la Géorgie, seule République de l'ex-URSS (en dehors des pays Baltes) à ne pas être dirigée par un ancien apparatchik communiste. Pour la reconquérir, le Kremlin a décidé de déployer toute son artillerie. Les barbouzes russes ourdissent complot sur complot. Le vice-ministre de l'Intérieur géorgien, Shota Utiashvili, un grand gaillard enrhumé, raconte : « Les services secrets de Moscou ont d'abord créé une unité chargée de détruire des infrastructures sensibles en Géorgie. Cette équipe a fait exploser un poste de police dans la deuxième ville du pays, Gori, et, l'hiver dernier, deux gazoducs et une ligne à haute tension. Son instructeur était un colonel du GRU, les services spéciaux de l'armée russe. Nous l'avons expulsé il y a quelques mois, dans le plus grand secret. »
Au lieu de se calmer, les services russes intensifient leur action. « En mai, ils ont essayé d'assassiner un leader politique géorgien, assure Shota Utiashvili. Puis cet été ils ont planifié une vaste opération de déstabilisation. Grâce à nos écoutes, nous savions tout. Nous voulions les prendre sur le fait. Mais, fin septembre, le chef de l'opération, un autre colonel du GRU, a décidé de réunir ses troupes en Arménie. Il nous fallait agir vite. D'où l'arrestation des six officiers russes dont on a tant parlé. »
Pour saper le pouvoir géorgien et particulièrement son président, Moscou a d'autres atouts dans sa manche. D'abord, les territoires séparatistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie. Au début des années 1990, après des exactions commises par les Géorgiens contre leurs populations, ces deux régions autonomes ont mené des guerres d'indépendance, sans succès. Aujourd'hui, les conflits sont « gelés ». Les deux entités, autogérées, ont des statuts indéterminés. Frontalières de la Russie, elles ont, de fait, été annexées par Moscou (voir encadré). Or Mikhaïl Saakachvili a fait du retour de ces deux provinces dans le giron géorgien la priorité de sa présidence, qui se termine en 2008. C'est sa principale faiblesse. Poutine le sait et en profite outrageusement. Fin septembre, il reçoit en grande pompe dans sa résidence de Sotchi les leaders séparatistes, ossète et abkhaze - deux chefs de clan reconnus par personne. Le président russe les traite en homologues et leur donne ostensiblement du « Monsieur le Président ». Le 12 novembre dernier, il va plus loin encore. Le Kremlin fait organiser un référendum en Ossétie du Sud sur l'indépendance de l'enclave et son association à la Russie. Résultat : un plébiscite. Et ce sera bientôt le tour de l'Abkhazie.
Mais rien n'y fait, ni les complots, ni les explosions, ni les déportations, ni le blocus : secoué, ballotté, menacé, l'encombrant Saakachvili ne tombe toujours pas. Les dernières élections municipales l'ont même conforté. Jusqu'où ira le Kremlin pour s'en débarrasser ? « Une balle dans la tête », répond en rigolant le « spin doctor » de Poutine, Gleb Pavlovski. A la Douma, on n'est guère plus rassurant. Grand, gros et moustachu, Konstantin Zatouline est l'un des députés russes les plus choyés par Poutine. C'est le héraut de la « Grande Russie ». Il menace : « Rappelez-vous que tous les présidents géorgiens ont été renversés. Alors pourquoi pas le petit dernier ? » Et la rumeur enfle à Moscou : des officines prépareraient un coup d'Etat contre Saakachvili avec l'aide de locaux.
Elles ont déjà essayé. En septembre, la police de Tbilissi a arrêté un groupe d'une douzaine de Géorgiens qui, selon elle, planifiait un putsch contre Saakachvili. L'opération aurait été financée par le bureau du Kremlin en charge des relations avec les ex-Républiques soviétiques, dirigé par le politologue Modest Kolerov. Le chef du complot, un certain Igor Guiorgadze, est un ancien patron de la police géorgienne. Il vit à Moscou et ne cache pas ses ambitions. En mai dernier, il affirmait à la télévision russe qu'à Tbilissi l'heure d'une « révolution des orties » avait sonné.
Les Américains laisseront-ils faire ? Qui sait ? Un ancien ministre de Saakachvili, Gueorgui Khaindrava, explique : « Les Etats-Unis ne veulent pas lâcher la Géorgie, mais Saakachvili... Il irrite beaucoup de monde, y compris à la Maison-Blanche. Il est trop impulsif, pas assez patient. Il veut faire la leçon aux Russes. Il a traité le patron du Kremlin de «Lilipoutine». C'est enfantin. Il est trop sûr du soutien de l'Amérique. Il n'a pas le sens de la situation géostratégique dans laquelle évolue la petite Géorgie. »
La Maison-Blanche le lui a rappelé le 13 octobre. Pour la première fois, elle a voté aux côtés des Russes une résolution onusienne condamnant les actions de la Géorgie en Abkhazie. Un choc pour Tbilissi. « Le message était clair, dit au «Nouvel Observateur» le ministre géorgien des Affaires étrangères. Aujourd'hui, les Etats-Unis sont très affaiblis. Ils ont besoin de la Russie sur les dossiers stratégiques, comme l'affaire du nucléaire iranien et nord-coréen. Nous devons donc être très prudents. »
En fait, les Géorgiens sont paniqués. C'est pourquoi ils se tournent désormais vers l'Europe à la recherche de nouveaux soutiens. « Mais l'Europe est en train d'ouvrir son parapluie, comme Chamberlain à Munich. Elle a trop peur que la Russie ne lui coupe les vannes de son gaz, dit, désabusé, Guiga Bokeria, une grande figure de la révolution des roses. Pourtant, si vous cédez, si vous ne nous défendez pas, les Russes comprendront qu'ils peuvent faire de vous ce qu'ils veulent. Et demain c'est vous qu'ils feront chanter. » A bon entendeur...
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