L'extrême droite flamande s'indigne des "concerts pour la tolérance"
Lorsque, voilà quelques jours, des artistes flamands, en Belgique, ont annoncé pour le 1er octobre la tenue d'un triple concert pour la tolérance, qui doit avoir lieu à Anvers, Gand et Bruxelles, les responsables du parti xénophobe Vlaams Belang (VB) ont vite compris que cette manifestation, inédite dans le pays, était dirigée contre eux. Contre leur programme et contre la multiplication des actes à caractère raciste qu'ils favorisent. Les concerts doivent avoir lieu, en effet, une semaine avant les élections municipales du 8 octobre...
Les dirigeants du VB ont souvent été dénoncés par leurs rivaux, des journaux et des intellectuels. L'annonce des concerts a fait redoubler leur colère. "Il est temps que, comme parti pour lequel vote un quart des Flamands, nous montrions les dents. Les artistes (...) doivent considérer qu'ils crachent au visage de tous ces gens", a lancé Frank Vanhecke, le président du VB. Filip Dewinter, son leader à Anvers, berceau du parti et ville qu'il veut conquérir à l'occasion de ces élections, a évoqué "un meeting contre nous" et accusé son initiateur, Tom Barman, du groupe rock dEUS, d'"abuser de (son) autorité morale". A Gand, Tanguy Veys, le chef local du VB, a lancé la mobilisation pour que les sites Internet et les courriels des artistes soient "bombardés" de messages hostiles.
LES CHANTEURS "POPULAIRES" VISÉS
La participation de dEUS, Clouseau, Zita Swoon, Axelle Red et Admiral Freebee à Anvers a été annoncée ; Arno, Adamo, Daan Stuyven, Mousta Largo, Marie et Jean-Louis Daulne seront sur la place DeBrouckère à Bruxelles ; Helmut Lotti, Sioen et Will Tura sont prévus à Gand. D'autres artistes doivent confirmer d'ici-là.
La vindicte des dirigeants du Vlaams Belang ne s'exerce pas spécialement contre les chanteurs flamands Tom Barman ou Arno, qu'ils qualifient d'adeptes de la "terreur gauchiste" ou contre les francophones (Adamo, l'humoriste Sam Touzani) qui les appuient. Ce parti a dans sa ligne de mire les artistes "populaires": le groupe Clouseau, le vieux crooner Will Tura, la chanteuse de variétés Laura Lynn. Ou Helmut Lotti qui, jusque-là, se contentait de populariser des airs classiques. Lotti a été particulièrement ciblé parce que son père, a affirmé un dirigeant du VB, est un sympathisant du parti et parce que lui-même aurait été membre des jeunesses nationalistes flamandes.
En réponse à une "lettre d'information" rédigée par Filip Dewinter et qui avait les apparences d'une menace, ces artistes ne se sont pas laissés impressionner. Will Tura a déclaré : "Je ne vois pas qui je peux heurter en chantant pour la tolérance." Helmut Lotti a confirmé sa participation en indiquant qu'il ne faisait pas de politique. Troublée par les attaques de certains de ses fans, Laura Lynn a indiqué qu'elle les respectait tous et ne faisait qu'appeler à "un monde meilleur", dans lequel ne se répéteraient pas les "tristes événements des dernières semaines". Une allusion au double meurtre raciste commis à Anvers, au mois de mai, par un jeune skinhead proche du VB.
Craignant les réactions d'une partie de leur lectorat, des journaux populaires se sont interrogés sur la pertinence des concerts. D'autres médias flamands ont affiché sans ambiguïté leur soutien : "M. Dewinter s'est trompé en réagissant aussi vite et de manière aussi incisive à cette belle initiative (...), il a affiché son vrai visage", écrivait, le 7 juillet, le rédacteur en chef du Standaard, un quotidien qui, comme d'autres, a souvent donné la parole aux dirigeants du Vlaams Belang.
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