Elle est bien ironique l'heure "des" pétitions qui réclament la liberté de pensée et qui s'opposent à ce que l'Etat dicte ce que les gens doivent croire, en Turquie, un intellectuel de renom est poursuivi pour cette raison (pas de pétition en vue, je crois
)
Le procès d’Orhan Pamuk reporté, l’UE déçueA la sortie du tribunal, des manifestants ont tenté d’empêcher la voiture de M. Pamuk de partir avant de lancer des oeufs contre le véhicule.Le tribunal chargé de juger l’écrivain turc Orhan Pamuk,
poursuivi pour des propos sur les massacres d’Arméniens commis sous l’empire ottoman, a ajourné vendredi le procès au 7 février, à la déception des observateurs de l’UE qui réclamaient l’abandon des poursuites.
L’auteur, lauréat du prix Médicis étranger 2005 pour «Neige » et de nombreux autres prix internationaux, a été pris à partie par une foule de manifestants d’extrême droite parvenus à s’introduire jusqu’à la porte de la salle d’audience et
accusant le prévenu d’être un «traître à la nation » turque.Une femme
a frappé Pamuk à la tête avec un dossier quand il se dirigeait vers le tribunal.
L’écrivain a suscité la fureur des milieux nationalistes en affirmant en février dans un magazine suisse : «un million d’Arméniens et 30.000 Kurdes ont été tués sur ces terres, mais personne d’autre que moi n’ose le dire ».
C’est pour ces propos, touchant un sujet sensible en Turquie, qu’il était jugé vendredi
sous le chef d’accusation d’«insulte ouverte à la nation turque ». Il risque de six mois à trois ans de prison.
Une délégation de parlementaires européens venus soutenir l’auteur s’est également plainte du «harcèlement » dont elle a été victime.
«Les avocats de la partie civile étaient agressifs, et pas seulement en paroles », a déploré Camiel Eurlings, rapporteur du Parlement européen pour la Turquie, rapportant une agression contre le député du Parlement britannique Dennis McShane (ex-Secrétaire d’Etat britannique à l’Europe).
Celui-ci a déclaré aux journalistes qu’il avait reçu
un coup de poing au visage asséné par un avocat, présent au tribunal pour un autre procès.
Lors d’une brève séance, les juges ont expliqué le report du procès par le fait
qu’ils attendaient l’autorisation du ministère turc de la Justice pour ouvrir les débats.
Le tribunal, arguant d’un article du code pénal turc en vigueur au moment des faits reprochés à l’écrivain, avait fait savoir le 2 décembre qu’il ne pourrait juger M. Pamuk que si ce ministère lui donnait le feu vert.
L’écrivain a regretté, dans un communiqué diffusé après l’audience, «de ne pas avoir pu assurer (sa) défense ».
«Il n’est pas bon pour la Turquie ou pour notre démocratie que les procès concernant la liberté d’expression -qui en premier lieu ne devraient jamais se tenir- tirent en longueur », a-t-il ajouté.
La suspension est intervenue en dépit de l’opposition de l’avocat de la défense, Haluk Inanici, qui a demandé aux juges d’entendre immédiatement son client ou d’abandonner sans attendre les poursuites.
La décision du tribunal et l’attitude du gouvernement ont été vivement critiquées par les observateurs européens.
«Le ministre de la Justice avait le pouvoir d’empêcher que ce procès ait lieu. C’est une déception qu’il ne l’aie pas fait », a estimé M. Eurlings, évoquant «une mauvaise journée pour la Turquie ».
«Le gouvernement turc a manqué une occasion de mettre fin à ce procès », a-t-il ajouté.
Le député européen Joost Lagendijk a quant à lui agité la menace d’une interruption des négociations d’adhésion entre l’Union européenne et la Turquie, entamées le 4 octobre.
«S’il y a de nouveaux procès de ce genre, le processus de négociations s’arrêtera, » a-t-il déclaré. «Si, à la fin, le gouvernement dit : ’oui, vous pouvez poursuivre le procès », la Turquie aura de très graves problèmes«.
Le ministre de la Justice Cemil Cicek a pour sa part félicité la cour.
»C’était exactement ce qui devait arriver«, a-t-il commenté, cité par l’agence de presse Anatolie. »Si quelqu’un pose une question, il doit attendre la réponse«. Les eurodéputés ont appelé Ankara à réviser les lois permettant de poursuivre des personnes pour l’expression d’opinions n’invitant pas à la violence.
A la sortie du tribunal, des manifestants ont tenté d’empêcher la voiture de M. Pamuk de partir avant de lancer des oeufs contre le véhicule.
La Libre Belgique