Prison à perpétuité pour l'assassin de Theo Van Gogh
AP | 26.07.05 | 14:49
AMSTERDAM (AP) -- Mohammed Bouyeri, l'assassin du cinéaste néerlandais Theo Van Gogh qui avait reconnu sa culpabilité en affirmant avoir agi au nom de l'Islam, a été condamné mardi à Amsterdam à la réclusion à perpétuité.
Le meurtre en novembre dernier de Theo Van Gogh, descendant éloigné du peintre Vincent Van Gogh, a suscité une immense émotion aux Pays-Bas, provoquant un regain de tensions entre la communauté musulmane et le reste de la population néerlandaise, qui s'inquiète de la montée de l'intégrisme islamiste.
Mohammed Bouyeri, Néerlandais d'origine marocaine de 27 ans, n'a pas manifesté d'émotion à la lecture du verdict, intervenu à l'issue de deux semaines de procès. L'accusé, qui a déclaré avoir voulu mourir en martyr, a été reconnu coupable d'avoir tué le cinéaste en pleine rue le 2 novembre 2004.
Muni d'une arme de poing et de deux couteaux, il avait d'abord ouvert le feu sur lui à plusieurs reprises, avant de l'égorger et de planter sur le corps, avec un autre couteau, une lettre de menaces promettant d'autres assassinats au nom de l'Islam. Il avait été arrêté au terme d'une fusillade avec la police, quelques minutes plus tard.
Le président du tribunal, Udo Willem Bentick, a souligné que la réclusion perpétuité était la seule sanction possible pour ce crime considéré comme un attentat terroriste, qui cherchait à déstabiliser la démocratie néerlandaise et son système politique. Mohammed Bouyeri voulait «instiller la peur au sein de la population néerlandaise. La cour en conclut dès lors que l'élément terroriste a été prouvé».
Le tribunal a en outre considéré qu'il n'y avait aucune possibilité de réintégration de Bouyeri dans la société, citant son absence totale de remords ou de volonté de revenir sur ses opinions extrémistes.
Mohammed Bouyeri, ont souligné les magistrats, a manifesté un «mépris complet pour la vie humaine». Theo Van Gogh a été «massacré sans pitié» et «c'est un miracle que deux passants seulement aient été touchés par des balles perdues».
Mohammed Bouyeri, lors d'une précédente audience, avait affirmé avoir agi au nom de l'Islam, sans ressentir de compassion pour la famille du cinéaste. «Ce qui m'a incité à faire ce que j'ai fait, c'est purement ma foi. J'ai été mû par la loi qui me commande de trancher la tête de quiconque insulte Allah et son prophète».
Il avait également répondu à un juge qui lui demandait pourquoi il haïssait la société occidentale, où ses parents, immigrés marocains, ont trouvé un refuge et du travail. «Je prie Dieu pour qu'Il m'épargne de penser un jour différemment d'aujourd'hui», avait-il dit en arabe.
Theo Van Gogh avait reçu des menaces après la diffusion du téléfilm «Soumission», réalisé avec la collaboration d'une députée néerlandaise d'origine somalienne. Cette dernière, Ayaan Hirsi Ali, a passé des mois dans la clandestinité après l'assassinat du cinéaste.
Dans ce court-métrage, une narratrice voilée racontait l'histoire fictive de quatre femmes musulmanes ayant été victimes d'agressions sexuelles dans leurs foyers. La protection policière entourant le domicile de Theo Van Gogh avait été levée faute de preuve concrète de la menace, selon le procureur Leo de Wit.
Le cinéaste était critiqué pour des films controversés. Plusieurs plaintes avaient également été déposées contre lui, l'accusant d'avoir tenu des propos antisémites, anti-chrétiens et anti-musulmans lors d'interviews ou dans les éditoriaux qu'il écrivait sur son site Internet ainsi que dans un journal néerlandais. Son assassinat a entraîné un regain de tensions, et de nombreux incendies criminels ont visé dans les jours suivants mosquées et écoles islamiques à travers le pays, où vivent un million de Musulmans. AP
Source : le nouvel observateur